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On a lu : Beltoise, comme un frère – Johnny Rives

par | Fév 24, 2016 | 11 commentaires

C’est un livre d’amitié, de fraternité même que vient de publier Johnny Rives sur son ami et, en quelque sorte, frère d’armes qu’était Jean-Pierre Beltoise. Un an après sa disparition si soudaine, au tout début d’un 2015 qui restera pour bien des raisons annus horribilis, le souvenir de « JPB » est toujours vivace chez tous les passionnés de sports mécaniques. Car Jean-Pierre, à l’instar de son idole de jeunesse Jean Behra, mais aussi de ses contemporains John Surtees et Mike Hailwood, qu’il côtoya sur les circuits, avait été d’abord coureur motocycliste, avant de passer à l’automobile.

Jacques Vassal

La carrière de Jean-Pierre sur quatre roues fut belle et brillante même si, pour diverses raisons que notre ami Johnny rappelle au passage avec beaucoup de clarté (et notamment l’accident de Reims en 1964, dont Jean-Pierre maîtrisa les séquelles avec un immense courage), elle ne fut pas aussi éclatante que l’homme le méritait.

Mais elle n’en est pas moins émaillée de quelques très grands moments, parmi lesquels la toute première victoire internationale de Beltoise en Formule 3 (sur Matra, à Reims, en 1965), ou encore les débuts de Matra en Formule 1, en 1968, avec un V 12 « maison » et la MS 11 d’usine, ainsi qu’avec l’écurie Ken Tyrrell et le moteur Ford-Cosworth V8 sur la MS 10, puis en 1969 avec la novatrice MS 80.

Dans chaque cas, Jean-Pierre joua un rôle majeur : au Grand Prix des Pays-Bas 1968 à Zandvoort, sous la pluie, il se paya le luxe de placer la V 12 2e à l’arrivée, après avoir menacé le leader Jackie Stewart en personne ! Avant cela, au Grand Prix d’Espagne, demandé par Ken Tyrrell pour remplacer Jackie Stewart blessé, Jean-Pierre avait hissé la nouvelle Matra-Ford MS 10 à la 5e place. En 1969, intégré à l’écurie F 1 de Ken Tyrrell aux côtés de Stewart, il fit mieux que seconder le champion écossais. A Charade, au Grand Prix de France, Jean-Pierre livra un combat homérique à Jacky Ickx (alors sur Brabham-Ford), à qui il ravit la 2e place grâce à une manœuvre habile et audacieuse.

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Avec les prototypes Matra V 12, et son ami Henri Pescarolo entre autres, Jean-Pierre signa d’autres exploits, comme le doublé victorieux au Tour de France 1970, après un redémarrage d’un V 12 crachant l’huile, par un froid matin au Mont Dore. Beltoise savait dans de tels moments parler à la mécanique, qu’il « sentait » depuis ses années de courses à moto (anecdote personnelle : au début 1964, la toute première interview de ma vie, pour Périscope, un journal d’une maison de jeunes ronéotypé à 500 exemplaires, Beltoise me recevant chez lui à Paris, enfin chez ses parents, rue des Pyramides, il courait encore à moto et déjà en auto, me confia très sérieusement avoir une approche « scientifique » de la course).

Tous les jolis épisodes de la carrière de Jean-Pierre sont détaillés au fil des pages écrites par Johnny Rives avec le style alerte qu’on lui connaît, toujours aussi clair et précis sur les secrets techniques, humains et autres de ce sport, mais jamais pédant pourtant, ni partisan. Ce qui n’est pas facile lorsque l’on raconte la carrière d’un ami. A cet égard, l’un des plus beaux chapitres du livre est celui consacré à la victoire de « JPB » au Grand Prix de Monaco 1972, sous une pluie battante et en devançant à nouveau Jacky Ickx (cette fois sur Ferrari 312 B), pourtant réputé maître du mouillé !

Dernier point à l’actif de l’auteur : la manière précise, documentée dont il raconte deux épisodes plus difficiles, dont l’un même dramatique : l’accident qui coûta la vie à Ignazio Giunti aux 1000 Km de Buenos Aires en 1971, et à propos duquel Beltoise fut injustement mis en cause – mais heureusement défendu par le directeur de course, Fangio en personne ! Et les premiers essais de la Ligier-Matra Formule 1, en octobre 1975, sur le circuit Paul-Ricard, à l’issue desquels Jean-Pierre fut évincé, de manière plutôt cavalière, au profit de Jacques Lafitte (auquel Beltoise, faisant la part des choses, n’allait d’ailleurs pas en vouloir).

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La biographie est un genre difficile en soi. Celles des pilotes ne sont pas toujours convaincantes. Ce livre, qui est plutôt un portrait vivant, évite tous les écueils du genre. Autant vous dire que sa lecture est chaudement recommandée.

(« Beltoise comme un frère », par Johnny Rives ; éditions du Palmier, 168 pages,15 euros).

https://www.editions-palmier.com/beltoise-comme-un-frere-biographies,fr,4,lautodro037.cfm

Beltoise, comme un frère première de couverture
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Beltoise, comme un frère dernière de couverture
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About Jacques Vassal
Avant de devenir un journaliste bien connu dans le domaine de la chanson (américaine, française et du monde entier), et dans celui du sport automobile et de son histoire, Jacques Vassal a été un « enfant dans la course ». Ses premiers souvenirs remontent à 1952 – il n’a alors que 5 ans. – quand son père l’emmène, en Bugatti 57, assister à Montlhéry à un « Grand Prix de France » de Formule 2. Puis en 1953, il assiste à ses premières 24 Heures du Mans et au Grand Prix de l’ACF à Reims. Bien d’autres ont suivi depuis… En 1985, il entame une collaboration régulière avec Le Fanauto – le mensuel dirigé par Serge Pozzoli – puis en 1989 il devient membre à part entière de la revue Auto-Passion. En 2006, pour le centenaire du Grand Prix de France, il réalise un livre d’or pour le compte de la FFSA. Auteur d’articles historiques dans L’Année Formule 1 de 1997 à 2008 (Chronosports) et, chez le même éditeur, co-auteur avec Pierre Ménard de plusieurs biographies de pilotes dans la série « Les Légendes de la Formule 1 », il a écrit aussi pour le magazine Automobile Historique et depuis 2006, il collabore au mensuel Rétroviseur.
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